Grand écrivain et penseur chinois, Tchouang Tseu est expert en méditation et en dialectique, manie volontiers l'humour (IVe siècle avant notre ère). Sa prose est souvent savoureuse. J'ai lu quatre éditions du Zhuangzi en français. Celle chez Gallimard est ma préférée (l'idéal serait d'apprendre le chinois). Dans cette critique, je propose des éléments utiles pour aborder sa cosmologie et sa philosophie. Dans d'autres critiques (éditions Albin Michel), je retiendrai des citations caractéristiques. Voir :
http://www.senscritique.com/livre/Le_reve_du_papillon/critique/41115158http://www.senscritique.com/livre/Aphorismes_et_Paraboles/critique/41115155
1. Le tao (dao) = l'être universel = la norme universelle = le principe primordial :
- À l'origine, un être primordial non-différencié : la norme universelle.
- Une tendance sans forme palpable : la norme inhérente à l'univers, sa formule évolutive immanente.
- Il n'y a de réel que la norme universelle.
- Avant le temps, tout était un, il n'y avait qu'un verbe général.
- Il n'y a en réalité ni vérité ni erreur, ni oui ni non, ni autre distinction quelconque, tout étant un, jusqu'aux contraires.
- Qui comprend qu'il a tout en un a conquis le trésor céleste. Il a l'illumination compréhensive, qui éclaire l'ensemble sans faire paraître de détails.
2. Les aspects divers dépendent des points de vue :
- Au principe primordial, l'homme ajoute les distinctions : moi-autrui, vie-mort, licite-illicite, possible-impossible, droite-gauche... Il invente les oppositions, les devoirs...
- Puis il ajoute arts et goûts, impressions et préférences subjectives. Tout cela ne peut ni se définir, ni s'enseigner.
- Tout ce qui est ajouté est imaginaire, subjectif. Erreurs d'appréciations subjectives dues au points de vue.
3. Le point de vue du Sage :
- Le Sage dédaigne ces vanités. Il ne veut rien ajouter aux vues subjectives déjà formulées. Car il est impossible d'exprimer un être ineffable !
- Dans la semi-obscurité de la vision synthétique, le Sage reste tranquille, au centre de la roue universelle, indifférent au sens dans lequel elle tourne.
- Il se tient au pivot de la norme : un point où ceci et cela, oui et non, paraissent encore non distingués. Au centre immobile d'une circonférence où roulent contingences, distinctions, individualités.
- Tout voir dans l'unité primordiale non encore différenciée, ou d'une distance telle que tout se fond en un.
4. Le comportement du Sage :
- Il s'abstrait du temps et voit tout en un.
- Il se tait, gardant pour lui ses impressions personnelles, s'abstenant de disserter sur des questions obscures et insolubles.
- Le sage retourne à l'origine. Par le non-agir (wuwei), il puise sa force et sa vitalité dans le Tao. Son action est conforme à la nature des choses et des êtres. Libéré de toute contrainte (discours, métaphysiques, conflits), il n'est soumis qu'à la nécessité des êtres.
- Intérieurement, il s'occupe de synthèse de tous les âges, il réduit tous les êtres à l'unité.